29 déc. 2011

Sénégal : Les familles se contentent du minimum pour les fêtes de fin d'année


La crise économique a plombé l'enthousiasme des familles pour Noël. Au quartier Fass de Dakar, on se contente du strict minimum.

C'est au quartier Fass que la famille Diagne a élu domicile. Hier matin, comme dans tous les quartiers populaires de Dakar, les ruelles sont bouillonnantes de monde. L'activité atteint son paroxysme. Les femmes, sorties tôt le matin pour aller au marché, sont déjà de retour. On voit quelques groupes de jeunes sous l'ombre des arbres avec leur fidèle « barada » -théière. Les enfants, quant à eux, jouent devant les maisons. D'autres s'exposent aux rayons du soleil. Le froid qui prévaut sur la capitale est passé par là. Au fond d'une ruelle qui fait face au poste de santé du coin, se trouve la famille Diagne, au 1er étage. Un immeuble qui contraste d'avec les habitations immédiates. Du haut de l'immeuble, on perçoit tout aux alentours le véritable visage du quartier. Que des baraques. La pauvreté ne se raconte pas ici. Elle se vit. De confession musulmane, le moral des Diagne est en berne en cette fin d'année. La faute « au manque d'argent », répond sans sourciller le jeune Badara. Il ne songe pas aux cadeaux et autres présents pour les plus petits.

Se débrouiller au quotidien

En ce qui le concerne, il va passer Noël chez un cousin à Guédiawaye avec ses amis. Dans sa bande de copains, « tu trouves des chrétiens et des musulmans ». Juste à côté de chez lui, se trouve la famille Dasylva. Thérèse y loge avec les siens. Elle vient à peine de terminer les travaux ménagers et tient un verre. Elle s'apprête à prendre son petit déjeuner. Au-dessus de sa tête, quelques décorations sont perceptibles sur le plafond. A priori, la fête se prépare. Mais pour elle, ce n'est pas encore le cas. De ce qui est utilisé, il n'y a rien de neuf. « Le matériel est celui de l'année dernière », révèle Thérèse Dasylva. Ce système de la débrouillardise est lié à « l'environnement financier difficile qui est commun à la majorité des familles sénégalaises », selon Mme Dasylva. Une situation qui fait qu'« on ne peut pas acheter de cadeau pour les enfants », d'après elle. Elle pense plutôt aux vêtements que les enfants doivent porter pour les besoins de la messe. « On va gérer le reste», confie-t-elle. Une façon de dire qu'elle va se débrouiller pour régler le minimum pour passer de « bons moments avec la famille ».La vingtaine environ, sa nièce Odette Mendy dit être « spirituellement en fête depuis le 1er décembre ». Vêtue d'une « taille-basse », une perruque sur la tête, son programme de fête s'articule autour de « la messe, des salutations aux voisins et amis ». Pour ce qui est de la soirée, « la boîte de nuit ne fait pas partie de son agenda ». La raréfaction de l'argent est passée par là.

Des élus sollicités pour la fête

 Du côté des Hlm Fass, la famille mixte des Faye et Tamba présente une particularité bien sénégalaise. Ici, nous sommes sous un toit islamo-chrétien. Maïmouna Faye est musulmane. Son père établit en France est originaire du Saloum. Sa mère, elle, est originaire de Casamance. En temps normal, elle est aux Hlm Grand-Yoff dans la maison paternelle. Mais, elle fréquente beaucoup la famille maternelle. Comme le reste de la famille chrétienne, elle s'est mise dans la disposition de Noël. Son fils dans les bras, l'étudiante en banque-assurances dans un institut de la place ne se fait pas de souci pour les cadeaux de son petit. « Son papa va s'en occuper », indique-t-elle. Dans la famille, « les fêtes musulmanes et chrétiennes sont toutes célébrées », d'après Maïmouna. Seulement, la situation morose de cette année les contraint à assurer le « service minimum ». « Tu vois qu'il n'y a rien de spécial dans la maison », dit-elle, en tendant la main vers tous les coins de la véranda. Pourtant, elle aurait voulu que les choses se passent autrement. Par exemple, « que la maison soit décorée avant la fête». Et pour fraterniser avec les autres, « nous aurions voulu inviter les voisins à se joindre à nous ».

Si les fêtes riment avec « bien manger, s'habiller élégamment et chausser de belles chaussures », ce n'est pas encore assuré, dit Maïmouna. Pour sa tante Diminga Tamba, le problème est ailleurs. Elle est en colère contre les Collectivités locales qui n'ont accordé aucun appui aux familles pour les besoins des fêtes. Elle préconise « que les Mairies trouvent un système pour permettre aux familles nécessiteuses de fêter comme toutes les autres ». Elle trouve « déplorable que les élus locaux n'aient pas mis en place un fonds pour venir en aide aux populations ». Surtout qu'il s'agit « d'un évènement aussi important que Noël ». Une opinion que partagent beaucoup de Fassois. Pour El Hadj Ndiaye, Diminga Tamba a d'autant plus raison que « Fass est un quartier défavorisé ». En tout cas, les habitants disent attendre du maire un geste pour les années prochaines.

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