En compétition dans la catégorie « Un certain regard » au festival de Cannes 2012, le film du Sénégalais Moussa Touré raconte la difficile traversée d'immigrants clandestins africains.
Dans la nuit noire et glacée une pirogue en bois poursuit sa traversée en mer, en transportant trente personnes décidées à rejoindre les côtes espagnoles. Ces aventuriers viennent d'Afrique et n'ont qu'une idée, matérialiser leur rêve nourri par les espoirs de ceux qui ont réussi à franchir la périlleuse traversée. Ils savent que c'est dangereux, mais savent aussi que d'autres ont réussi. Ceux qui sont revenus au pays « faire des affaires ». Malgré la colère des vagues et les soubresauts de la pirogue, ils tentent leur chance car convaincus qu'ils y arriveront.
Le film de Moussa Touré pose le problème de l'immigration. D'ailleurs l'image de la pirogue aux couleurs officielles de la plupart des pays africains, reflète l'ampleur d'une situation générale. « Le film a choisi le dialogue sans verbiage et des regards intenses pour parler des sentiments qui se passent de mots et accentuer la progression vers le danger.
Il y a de fréquentes références au rituel, avec des rêves de baobabs centenaires et de troupeaux de bœufs. Un symbolisme qui met en opposition l'immobilisme et l'usure d'un système et la fougue de jeunes prêts à foncer, même si c'est tête baissée », commente Stéphanie Dongmo, journaliste, présidente du Cinéma Numérique Ambulant, une association camerounaise.
Le film « La Pirogue » est allé au delà de ce que les autres cinéastes ont voulu montrer à travers l'immigration clandestine opérée par des milliers d'Africains en mer, sur des pirogues. La caméra de Moussa Touré a pris les détails, en mettant un accent sur les dialogues, les sentiments et l'effroi des aventuriers.
En 1h27mn, le réalisateur a réveillé ce que Sembene Ousmane tentait d'exprimer dans « La Noire de... » en 1966 ou encore ce que la Camerounaise Joséphine Ndagnou avait juste caressé dans « Paris à tout prix » son long métrage sur l'immigration clandestine sortien 2007.
C'est pour interpeller la conscience, sans doute, que le réalisateur sénégalais a bravé la haute mer pour tourner ce film sorti cette année, et soutenu par le Fonds audiovisuel Francophone. Rappelons enfin qu'environ 5 000 Africains, entre 2005 et 2012, ont péri en haute mer lors de telles expéditions.
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