27 juin 2012

Le Gouvernement Éthiopien entend interdire Skype et d'autres Outils en Ligne



Afin de protéger le fournisseur télécom qui lui appartient, le gouvernement éthiopien a déposé une législation qui fera de l'utilisation d'outils de communication en ligne comme Skype un délit passible de 15 ans de prison, selon ce que rapportent le Comité pour la protection des journalistes (CPJ), l'Institut international de la presse (IIP) et Reporters sans frontières (RSF).
La nouvelle loi, adoptée le 24 mai, criminalise l'utilisation sur Internet d'outils de communication indépendants comme Skype, Viber et GTalk, dit l'IIP.
Bien que le gouvernement ait déclaré que la loi a été déposée afin d'empêcher l'unique fournisseur de télécom du pays, Éthio Télécom, qui est administré par l'État, de perdre de l'argent au profit de concurrents en ligne low-cost, le CPJ soutient que l'interdiction de la technologie de communication en ligne empêchera également les journalistes et les dissidents de s'entretenir à peu de frais et de manière sécuritaire avec des sources à l'étranger - mettant effectivement un terme à leur aptitude à offrir du journalisme indépendant.
La loi rend également illégal d'importer, de vendre ou de posséder de l'équipement de télécom , dit le CPJ. Toute personne surprise en train de tenter de contourner la loi risque d'être accusée d'un certain nombre de délits, tels que « obstruction ou ingérence » dans le réseau, délit passible de 15 ans de prison, ou encore « distribution de messages de terreur », délit passible de huit ans de prison et d'une amende de 500 $US.
La loi antiterroriste criminalise déjà le journalisme favorable aux groupes et aux causes de l'opposition, qui reste interdite, dit le CPJ.
Le groupe note également que le gouvernement tente depuis quelques années de contrôler les communications sur Internet, et cite des rapports selon lesquels les cafés Internet qui offrent des services comme Skype sont tenus de conserver en dossier les noms et adresses de leurs clients.
En même temps, le gouvernement éthiopien a installé en ligne des filtres sophistiqués afin de fermer tout accès détourné à l'Internet. RSF, l'IIP et l'Initiative OpenNet, un groupe qui enquête et met à nu les pratiques de filtrage et de surveillance de l'Internet, rapportent que Éthio Télécom avait bloqué l'accès au réseau Tor, un outil en ligne qui permet aux utilisateurs de naviguer sur Internet de manière anonyme.
Pour se livrer à ce type de blocage sélectif, dit RSF, Éthio Télécom doit utiliser « Deep Packet Inspection », une méthode avancée de filtrage de réseau, généralement utilisée par des pays répressifs comme la Chine et l'Iran. RSF s'inquiète que cette démarche indique que les autorités éthiopiennes n'hésitent pas à s'abaisser de nouveau et pourrait constituer un signe avant-coureur de l'interception des courriels, des messages sur les médias sociaux et des conversations en ligne.
« Nous craignons que Deep Packet Inspection ne soit utilisé à mauvais escient à des fins de surveillance par un gouvernement qui soumet déjà l'opposition politique et les médias privés à beaucoup de harcèlement », dit RSF.
Les mesures prises pour criminaliser la dissidence en ligne sont les dernières en date utilisées dans une nouvelle vague de répression dirigée contre les journalistes et les médias indépendants. Le journaliste Eskinder Nega et plusieurs activistes sont accusés d'incitation au terrorisme et sont passibles de la peine de mort. Un verdict dans leur affaire est prévu le 21 juin.
Selon le CPJ, un reporter américain qui travaille à la Voix de l'Amérique et son traducteur éthiopien ont également été détenus récemment , et la radiodiffusion en araméen de la Voix de l'Amérique a été brouillée et son site web bloqué, tandis que « The Reporter », un hebdomadaire privé, informait RSF que son site web était censuré.
De toute évidence, les autorités se sentent profondément menacées par quelque source que ce soit d'information indépendante, depuis le journalisme critique jusqu'au partage de l'information en ligne », dit le CPJ.

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